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23 juillet 2014

La vie d'artiste (intermittent)

Mercredi 23 juillet 2014

Tout juste rentrés de notre premier tour de France de l'été et avant de vous conter ci-dessous par le menu nos concerts d'Hossegor, Gruissan, Marvejols, St Agrève, St Martin en Haut et Métabief, j'ai eu envie, en complément du coup de gueule poussé par Mary dans ces mêmes colonnes il y a quelques mois, d'expliquer aux néophites que vous êtes peut-être ce qu'est le statut d'artiste ou technicien intermittent du spectacle vivant, du cinéma ou de l'audiovisuel. Je sais, la phrase est longue, mais moins longue que la liste des griefs qui ont provoqué la juste colère de nos collègues. Vous avez été nombreux à nos concerts à vous intéresser à la question, et à nous montrer une sympathie, voire une solidarité instinctives qui nous ont touchés. Merci !

Comment devient-on intermittent du spectacle ?

Ce statut particulier, créé en 1936 pour les techniciens et cadres du cinéma, s'étend en 1965 aux techniciens du disque et de l'audio-visuel, et en 1969 aux artistes interprètes (nous) et aux techniciens du spectacle vivant (Hugues et Thierry autrefois, et Martin aujourd'hui).

Il permet aux intéressés de bénéficier d'une indemnisation des Assedic (40 à 50 € par jour chez ceux que nous connaissons) les jours non travaillés. 

La condition pour l'obtenir est d'avoir réussi à réunir 43 cachets en 10 mois et demi pour les artistes, et 507 heures de travail en 10 mois pour les techniciens.

Pour "visualiser" la chose, imaginez-vous en situation de devoir trouver pendant l'année scolaire 43 employeurs prêts à vous embaucher et à vous déclarer pour un contrat d'une journée avec votre guitare. Ca vous paraît tout à coup beaucoup plus compliqué ... et vous avez raison. Si vous êtes jeune et que vous rêviez d'une carrière d'artiste, trouvez vous un petit boulot alimentaire et faites de la musique à côté. Oubliez le statut d'intermittent, c'est une vraie galère.

Pourquoi sommes-nous en colère ?

C'est à la fois très simple et très compliqué. 

D'abord, il faut préciser une chose : les artistes qui gagnent plein d'argent, les Depardieu, les Johnny Halliday, représentent un pourcentage infime de la profession. Nous avons tous rêvé de faire Rolling Stone (moi en tout cas), mais il faut bien reconnaître que faire Mary-Lou c'est déjà une chance insensée que la vie nous a offerte.

Lea artistes et techniciens sont des gens qui aiment leur métier, et qui prennent plaisir à donner leur énergie, leur créativité, parfois leur vie au public. Le besoin d'être utile. De mettre du baume au cœur de ses amis de ses voisins, puis des inconnus qu'on croise pour une soirée. Les artistes ont toujours existé, ils ont toujours travaillé avec des costumiers, des décorateurs, des artificiers, des éclairagistes, des sonorisateurs. Autrefois les rois et les mécènes s'enorgueillissaient de favoriser la création artistique.

Ajourd'hui c'est Pôle Emploi qui nous indemnise, dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle.

En 2003, un soi-disant accord a été signé entre Medef et CFDT qui a rogné notre indemnisation, rendu l'accès à ce régime beaucoup plus difficile et jeté de très nombreux intermittents à la rue.
A la suite de cette réforme révoltante qui avait provoqué de nombreuses grèves, manifestations, et l'annulation de nombreux festivals (le seul moyen de faire réagir les pouvoirs publics), une coordination des intermittents et précaires s'est créée. Elle a initié des travaux longs et pointus, avec un groupe parlementaire, des élus, des chercheurs, des créateurs, des sociologues, etc... Le but étant de faire des propositions pour :

réduire le fameux déficit des annexes 8 et 10 en plafonnant ou supprimant l'indemnisation de gens qui n'en ont pas besoin

rendre le statut plus juste en veillant à ne pas étrangler les plus fragiles des collègues

Ces propositions ont été transmises aux ministres successifs, et à l'époque de Sarkozy, tout le gratin du PS les a signées à commencer par Rebsamen, l'actuel ministre du travail.

En mars 2014, renégogiation, comme le veut la loi, des règles de l'UNEDIC. En préambule Pierre Gattaz réclame la suppression du statut d'intermittent !

Les propositions du groupe parlementaire sont ignorées, et MEDEF et CFDT (qui ne représentent personne dans le spectacle, ni chez les employeurs, ni chez les salariés) se mettent d'accord pour une nouvelle convention qui réduit à nouveau l'indemnisation des 106 000 intermittents en s'en prenant, en plus, aux 4 million d'intérimaires, dont chacun sait bien que ce sont également des privilégiés.

Alors nous pensions que les socialistes honoreraient leur signature, mais non. Rebsamen a agréé cet accord qui est stupide et contre productif. Nous en sommes là, à l'heure où j'écris, mais une fois de plus nous sommes passé à côté d'une occasion de mettre les choses à plat et d'agir avec justice, tolérance et efficacité.

Quand à sortir notre profession de la solidarité interprofessionnelle, c'est un peu comme lutter contre les cotisation payées par les hommes célibataires pour les congés de maternité.

Questions :

Pourquoi Gattaz a t-il réclamé la suppression du statut d'intermittent ? Parce qu'il a pensé que même durci, nous serions heureux de le conserver ?

Pourquoi a t-il annoncé le chiffre de 1 milliard de déficit, chiffre repris ensuite par les médias, et que les dirigeants de Pôle Emploi eux mêmes se sont sentis obligés de corriger, tellement le mensonge était gros ? (le chiffre "officiel" de Pôle emploi est d'au maximum 300 millions de déficit)

Pourquoi ne parle t-on jamais des 5000 techniciens qui travaillent en permanence à Radio France obligés à être intermittents, des 3000 qui travaillent en permanence sur les chaines publiques de télé ? Et de tous les autres "permittents" employés dans les grosses prod ... Vous ne pensez pas qu'ils aimeraient mieux avoir un vrai contrat et pouvoir s'acheter une maison tous ces privilégiés ?

Qu'est ce qui motive le double langage de ces médias ?

Qu'est ce qui motive le double langage du gouvernement ?

Q'est ce qui motive le double langage du MEDEF (on réclame une baisse des cotisations, mais on paye les gens au "black" dès que l'occasion se présente) ?

Qu'est ce qui motive le double langage de la CFDT qui ne nous représente pas et se permet de décider pour les intéressés ?

Un compagnon de route de Gattaz à l'UIMM(entreprises de la métallurgie, une composante du MEDEF), Gautier Sauvagnac, a été condamné récemment par la justice à 3 ans de prison dont un ferme et 375 000 € d'amende pour abus de confiance, travail dissimulé, destruction de documents comptables, recel ou  complicité. Il avait déclaré que les 16 millions d'euros détournés avaient servi à "fluidifier les relations sociales".

Que chacun tire les conclusions qu'il voudra ...

th

 

Jean-Luc

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